par Véronique Souchet, Manager Offre & Expertise Communication, Cegos
Série thématique "Les papiers prospectifs"
Dans l’environnement en perpétuelle mutation qui est le nôtre, de nouveaux défis invitent les communicants à imaginer un nouveau rapport au temps, à l’espace et au vivant. L’accélération de la digitalisation, l’urgence de la RSE, et un état de crise permanent bousculent l’organisation du travail, questionnent nos styles de vie, nos modes de représentation et nos valeurs.
Quelles seront les conséquences de ces nouvelles exigences sur les métiers de la communication à l’horizon 2030 ? Quel impact aura le communicant dans cette société aux nouveaux visages ? Quelles compétences clés devra-t-il développer pour transformer son métier et inventer de nouvelles représentations et dispositifs de communication ?
Comme le souligne Olivier Beaunay dans son ouvrage La Boussole des Futurs, la prospective nous aide à imaginer un futur possible et souhaitable. En s’appuyant sur l’observation du quotidien, les sciences sociales et des études spécialisées, il est ainsi possible d’explorer dès maintenant les enjeux à venir de notre activité, et par là même anticiper les conditions de notre employabilité.
Garder le cap dans un monde en transition
La communication ces vingt dernières années s’est fortement spécialisée. Le métier a gagné en expertise et en technicité. Chef d’orchestre 360° ou expert pointu, le communicant s’est adapté à l’accélération digitale de son métier, qu’il soit annonceur, en agence ou freelance. Plus que jamais, de nouveaux enjeux s’imposent à la profession.
Renforcer l’attractivité du métier
Une récente étude menée par Occurrence souligne l’urgence de repenser l’activité du communicant, le sens et l’intérêt intellectuel attribués à ses missions, tout en respectant un équilibre de plus en plus recherché entre vie professionnelle et vie personnelle.
Dans les prochaines années, l’enjeu va donc être d’accompagner les équipes à développer leur posture de « business partner » et de conseil. Il va falloir aider le communicant à occuper pleinement sa place au milieu de toutes les transformations économiques, sociétales et environnementales en cours.
Maîtriser data, éthique et sobriété
D’ici 2030, les entreprises et les individus auront progressé sur le chemin de la neutralité carbone. Les nouveaux territoires de l’intelligence (IA, web 3.0, métavers etc.) et de la data (90% des données existantes auraient été produites au cours de ces 2 dernières années) se seront étendus. 85% des emplois qui seront exercés en 2030 n’existeraient pas encore aujourd’hui, selon un rapport de Dell et de l’Institut pour le Futur en 2021.
A l’échelle mondiale, des visions sont partagées et de nouvelles règles de communication se mettent en place, notamment sur le périmètre de la RSE. Le Réseau Global Alliance composé de plus de 350 000 communicants dans 126 pays, mène une réflexion commune autour notamment des nouvelles technologies, de l’éthique et de la data.
Des formations en analyse des données, droit et éthique devront être intégrées aux cursus initial et continu des communicants.
Écrire de nouveaux récits et développer son leadership d’influence
La technologie sera-t-elle l’unique moteur de l’innovation en communication ? Dans un environnement toujours plus connecté et intelligent, la puissance du langage sera redoutable. Et sa maîtrise, un passage obligé. Créativité et storytelling permettront d’établir une relation émotionnelle durable avec ses parties prenantes.
En s’appuyant à la fois sur sa connaissance de l’humain avec l’évolution des neurosciences, l’intelligence artificielle et de nouvelles méthodes de travail, le communicant pourra continuer à explorer de nouveaux dispositifs créatifs avec des contenus plus personnalisés sur des canaux de diffusion plus immersifs.
Le communicant aura également un rôle stratégique à jouer dans la transformation de nos modes de représentation. Aujourd’hui déjà, il bouscule ses pratiques de communication, et se forme à concevoir ses actions selon des critères éco-socio responsables.
L'enjeu sera de concilier cet accompagnement des organisations et de leurs équipes vers plus de sobriété avec une recherche croissante de la prise en compte de l’épanouissement personnel. Véhiculer des valeurs et des représentations plus inclusives et durables. Passer d’une culture de la possession à celle de l’usage, au service d’un imaginaire collectif plus vertueux.
« Créer du commun »
Pour le communicant, il s’agira de revenir à l’essence de son métier : donner du sens et une vision à la stratégie des organisations. La communication interne, tout comme la communication managériale, seront des éléments clé dans la gestion des transformations qui s’annoncent.
Créer du commun avec ses parties prenantes, favoriser une communication de proximité, territoriale, en circuit court : encore un enjeu pour le communicant de demain.
S’adapter à un futur du travail pluriel
Généraliste ou expert, le communicant devra plus que jamais faire preuve d’adaptabilité pour suivre les mutations permanentes du métier et de ses missions.
Upskilling et reskilling
Dans un récent baromètre publié par Cegos, les Directions des Ressources Humaines soulignent que près d’un emploi sur deux pourrait présenter un risque d’obsolescence des compétences d’ici trois ans. De nombreuses études soulignent par ailleurs la durée de vie de plus en plus courte des compétences techniques, réduite à moins de 12 mois.
Si les communicants fraîchement sortis d’école sont jugés bien préparés aux mutations du secteur, qu’en est-il des profils plus seniors et expérimentés ? La réponse réside dans une offre de formation continue et adaptée. Il va devenir de plus en plus essentiel pour les communicants junior et senior de se former pour s’adapter aux évolutions de leur poste de travail, renforcer leur mobilité interne ou accéder à un nouveau métier ou spécialisation.
Mobiliser ses soft skills
Évoluer professionnellement dans ce monde en transition, c’est développer sa capacité à gérer l’incertitude, mais aussi son agilité, son intelligence émotionnelle et sa créativité. Pour cela, il faut maîtriser ce que l'on appelle des soft skills.
Par soft skills, il faut entendre les compétences « transversales », c’est-à-dire mobilisables quel que soit le contexte ou le métier exercé.
Des compétences clés pour s’adapter à notre monde en transition, asseoir sa posture, cultiver son esprit critique, intégrer innovation et disruption, favoriser l’intelligence collective en interne avec les DRH, les directions Métiers et RSE et ses parties prenantes.
Apprendre à apprendre en continu
Responsabilisation et proactivité sont des leviers clé dans le processus d’apprentissage actuel des communicants. Cela suppose des dispositifs de formation continue ancrés dans le flux de travail, au plus près de l’opérationnel.
Être acteur de son apprentissage
L’effectuation, ou philosophie de l’action, occupe une place croissante dans la stratégie d’apprentissage, désormais plurielle et multimodale. Les individus deviennent ainsi acteurs de leur employabilité, au sein d’organisations de plus en plus « apprenantes ». On observe notamment un réel engagement individuel dans la formation continue : 85 % des salariés français (91 % à l’échelle internationale) se disent prêts à se former par eux-mêmes.
Design thinking, adaptive learning, et social learning
Parmi les nouvelles modalités de formation, trois suscitent un intérêt croissant chez les décideurs RH, soucieux d'individualiser les parcours et de diversifier les modalités de formation. Il s’agit du design thinking, de l’adaptive learning et du social learning.
L’enjeu est d’individualiser les parcours à l’aide d’une intelligence artificielle tout en encourageant les apprenants à s’exercer collectivement et à s’entraider au quotidien.
Le mode projet et le gaming renforcent déjà les dispositifs de formation. Pour accompagner la mise en œuvre de ces formations d’un nouveau type, une équipe dédiée de tuteurs, mentors, coachs ou communauté de pratique seront mis en place. De premières expériences immersives voient également le jour.
L’art thinking, comme nouveau mode d’apprentissage ?
Comme l’anticipe OIivier Beaunay, l’art thinking perçu comme une pratique managériale encore confidentielle au début des années 2020, deviendra-t-il d’ici 10 ans un nouveau mode d’apprentissage ?
L’art thinking consiste à questionner, casser les codes, innover et créer des idées nouvelles, à partir d’une méthode s’inspirant de l’art et de l’entrepreneuriat.
D’ici 2030, cette discipline viendra vraisemblablement enrichir les pratiques croisées existant déjà entre la communication, l’anthropologie et les sciences sociales.
« La communication sera humaniste ou ne sera pas ». Cette conviction forte partagée par Séverine Lecomte, présidente de COM-ENT, souligne l’approche à la fois fédératrice, solidaire, vivante et agissante de la communication.
Le communicant a de belles perspectives devant lui. Restons donc confiant sur l’attractivité du métier !
Ecouter La Boussole des Futurs, le podcast prospectif de COM-ENT (réalisé par l'agence Newing)
Retrouver La Boussole des Futurs, l'essai prospectif rédigé par Olivier Beaunay
Lire Le papier prospectif 1 par Oui Care
Commentaires0
Vous n'avez pas les droits pour lire ou ajouter un commentaire.
Articles suggérés