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Stéphanie Selle, Directrice de Planète Enfants & Développement : “la confiance est l’un des principaux ressorts du don”

LES ESSENTIELS

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25/06/2020

Elle n’était pas passée inaperçue. Et c’est peu dire : avec un reach global de 9 millions de personnes et une belle exposition médiatique, la campagne “Mauvaise raison de donner”, réalisée pour l’association Planète Enfants & Développement par l’agence Brainsonic, n’a pas laissé indifférent. Saluée par la profession, récompensée du Grand Prix COM-ENT en décembre dernier, elle a offert un supplément de notoriété à l’association. Mais émerger n’est pas chose aisée dans un paysage associatif saturé, comptant plus d’1,5 million d’associations. Problématiques de valorisation des actions auprès du grand public, orientations stratégiques… Stéphanie Selle, Directrice de Planète Enfants & Développement, a accepté de répondre à nos questions. 

COM-ENT : Quelle est la vocation de Planète Enfants & Développement ? 

Stéphanie Selle : Planète Enfants & Développement est le fruit de la fusion de deux associations assez anciennes, dont les mandats portaient sur la protection des enfants vulnérables : Planète Enfants, née en 1992 et Enfants & Développement, fondée en 1984. Depuis 2016, sa mission est d’appuyer les adultes, membres de la famille, éducateurs, professeurs d’école, pouvoirs publics ou autres acteurs privés du monde de l’enfance, afin qu’ils procurent à l’enfant un environnement stimulant et protecteur. Tous les projets visent l’autonomie des personnes et des partenaires : Planète Enfants & Développement travaille avec les bénéficiaires et les acteurs locaux pour renforcer leurs capacités. Implantée dans 4 pays, elle agit dans des contextes et avec des populations qu’elle connait bien : le Cambodge, le Vietnam, le Népal et le Burkina Faso. 

Quelle stratégie de développement poursuit Planète Enfants & Développement ?

En 2020, notre objectif est d’accroître nos ressources, et, dans les années à venir, de doubler le budget d’activité de l’association. Cela nous permettrait d’étoffer notre structure et d’avoir plus de latitude pour explorer de nouveaux projets, acquérir encore davantage d’expertise et soutenir, par ricochet, l’accroissement des programmes. Nous n’avons pas vocation à devenir une très grosse association : cette taille humaine est synonyme d’agilité, de flexibilité. Et cette flexibilité est un atout, notamment en matière de prise de décisions. Aussi, en termes de créativité, car nos collaborateurs ont une vision globale de l’activité. Ce décloisonnement et cette porosité des savoirs enrichissent nos projets et nos interventions. 

C’est dans cette volonté de développement qu’ont été créés deux postes en 2019 : un poste de responsable de collecte et de communication, et un poste dédié à la recherche de fonds auprès des entreprises et fondations. Les leviers de collecte et le recrutement de nouveaux donateurs et la fidélisation requièrent beaucoup de temps et d’attention, eu égard à cet objectif stratégique. Le but est d’obtenir une collecte plus élevée pour avoir un effet de levier plus important et ainsi, déployer de plus gros projets. 

COM-ENT : Quelles sont vos principales problématiques de communication ? 

Le périmètre de Sylvie (Morin-Miot, Responsable Collecte et Communication) couvre aussi bien la communication institutionnelle, la communication projets pour le siège et les 4 pays où nous sommes présents sur leur communication en local. Mais la principale difficulté, pour une petite structure comme la nôtre, s’inscrit dans une problématique plus vaste de positionnement dans le paysage des ONG internationales. Nous revendiquons une méthodologie, une flexibilité propices à l’élaboration de programmes à fort impact, qu’il est de surcroît possible de passer à l’échelle d’un pays. Mais du fait de notre petite taille, l’acquisition de notoriété est plus complexe : il peut être difficile de faire entendre notre voix et de valoriser à sa juste mesure la portée de nos actions. 

Nos prises de paroles se fondent principalement autour de deux axes : sur le terrain, sous la forme de plaidoyers, pour essayer de faire évoluer la loi ou son application. A titre d’exemple, au Cambodge, nous faisons face à un phénomène d’enfants “left behind”, dû à l’exode rural des mères vers les nouvelles usines de vêtements, entre autres. Nous travaillons avec le gouvernement cambodgien pour faire en sorte que des crèches soient créées dans les villages. En France, nous prenons essentiellement la parole sur la petite enfance et notamment sur les modes de garde et la préscolarisation. L’actualité nous est favorable car le gouvernement a saisi l’importance des 1000 premiers jours. Dans les pays où nous sommes implantés, nous oeuvrons pour la mise en place de programmes destinés aux 0-6 ans, une période cruciale dans le développement d’un individu, et par extension, pour rompre la spirale de la pauvreté et la violence. 

C’est ce que nous expliquons aux bailleurs et aux donateurs. Mais ce n’est pas toujours facile quand on travaille dans des pays différents avec des outils variés, à la fois sur l’enfance, l’accompagnement des familles, la santé des mères… Trouver les mots rassembleurs que l’on puisse s’approprier pour exprimer notre valeur ajoutée, notre élément différenciant est une véritable problématique. Il s’agit non pas de complexifier notre plateforme de communication, mais de la rendre plus incisive, plus énergique, plus impactante. Il y a pléthore d’associations sur l’enfance et une confusion entre les les logiques d’accompagnement dans la durée, de développement, comme nous le faisons chez Planète Enfants & Développement, ou de parrainage d’enfants, issues de la charité. 

En quoi la communication est-elle un levier dans l’atteinte de vos objectifs stratégiques ? 

Comme évoqué précédemment, notre stratégie de développement repose en partie sur une stratégie de visibilité et de notoriété, et donc d’interpellation du grand public. La campagne “Mauvaise raison de donner” était d’ailleurs davantage une campagne de communication que de collecte, même si elle a contribué à boucler la collecte 2019. Mais elle a avant tout agi sur la notoriété de Planète Enfants & Développement, comme en témoignent les reprises des accroches sur les réseaux sociaux ou les retombées presse.

Ce type de campagnes (en probono, ndlr) concourt à faire progresser la notoriété de l’association et soutient l’efficacité des actions de collecte, notamment dans un contexte d’attrition : la confiance est l’un des ressorts du don, et il est difficile d’avoir confiance dans un acteur dont on n’a jamais entendu parlé.

Comment communiquez-vous avec vos donateurs ?

Depuis deux ans, le marché des dons publics s’est un peu rétracté. Toutefois, si la relation avec les donateurs est assez saine, le taux de fidélisation est plutôt stable. C’est le cas de Planète Enfants & Développement : la proximité et la transparence sont au coeur de nos actions. Les questionnaires que nous adressons à nos donateurs portent aussi sur nos modes de communication et de collecte. De fait, ils se sentent informés, et donc impliqués. A titre d’exemple, nous avons commencé, en 2018, à faire du recrutement de rue et l’avons fait savoir dans notre newsletter ainsi que nos motivations. Nous essayons d’avoir une éthique de moyens, pas uniquement de fins, et avons pris le parti de communiquer dessus. Et l’accueil est favorable.

Parmi nos supports de communication, le rapport d’activité reste l’occasion d’expliquer en détails l’affectation des dons aux différents projets. La newsletter semestrielle est un autre rendez-vous : elle est envoyée au format papier pour une partie de notre base dont nous n’avons pas obtenu les adresses e-mail. A côté de cela, Planète Enfants et Développement suit un planning éditorial régulier : entre newsletter hebdomadaire, alternant entre information sur les projets, sur les thématiques, les pays ou la vie associative, réseaux sociaux (LinkedIn, Twitter, Facebook et Instagram) avec chacun sa cible particulière, nous permettant d’exister et de gagner en notoriété, et enfin, le site Internet par l’intermédiaire duquel nous recevons des propositions de bénévolats, de partenariats ou encore de mécénats de compétences.

Communiquer sur l’enfance : un exercice périlleux ?

L’une des difficultés pour les associations de la petite enfance est de sortir de cette communication attractive mais non différenciante consistant à afficher la bouille d’un petit enfant asiatique ou africain. Mais, s’il y a des difficultés, il y a surtout une ligne de conduite. La nôtre est d’éviter la communication misérabiliste : on peut facilement générer de l’émotion avec un enfant, surtout s’il est montré dans un état de fragilité… Nous préférons le présenter tel qu’il est après avoir été accompagné par Planète Enfants & Développement.

Quels sont vos prochains chantiers de communication ?

Nous sommes actuellement à la recherche d’une agence (en probono*) pour nous accompagner sur la mise en place d’un dispositif de réalité augmentée. Cet outil de sensibilisation, que nous souhaiterions utiliser lors des recrutements de rue, aurait pour but, par exemple, d’exposer, de manière immersive, le quotidien d’un travailleur social au Vietnam, ou d’une famille cambodgienne, et ainsi faire toucher la réalité du terrain. Sur le long terme, nous aimerions être accompagnés sur l’approche stratégique de notre communication, pour agir, non plus “par coup” mais sur la durée. Enfin, nous recherchons également, toujours en probono, une agence pour réaliser notre nouvelle campagne de fin d’année 2020.  

* Vous êtes intéressés et souhaitez entrer en contact avec Planète Enfants & Développement ? Envoyez un mail à sylvie.morin-miot@planete-eed.org

Propos recueillis par Géraldine Piriou, cheffe de projets contenus, COM-ENT

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