#DIRCOMM(DÉ)CONFINÉS #INTERVIEW12 – Stéphanie Herrmann, directrice de la communication éditoriale d’Unibail-Rodamco-Westfield
La série #DIRCOMM(DE)CONFINÉS signée Epresspack fait sa rentrée. Entre mesures sanitaires obligatoires et télétravail qui se prolonge, le contexte économique et social demeure incertain et imprévisible pour la communication des marques et des entreprises. L’éditeur de newsrooms digitales reprend le cycle de ses rencontres avec les professionnel.les de la communication et du marketing qu’il accompagne en Europe. Stéphanie Herrmann, directrice de la communication éditoriale du groupe Unibail-Rodamco-Westfield, créateur et opérateur global de centres de shopping dans le monde, inaugure la saison II. Le secteur d’activité, sentinelle de la consommation des ménages, est d’actualité pour cette rentrée.
Sur le papier, Stéphanie Herrmann est directrice de la communication éditoriale d’Unibail-Rodamco-Westfield depuis juin 2018, mais dans la vraie vie, cette jeune femme souriante et spontanée de 38 ans, a la responsabilité de la communication corporate d’Unibail-Rodamco-Westfield, première marque mondiale de centres commerciaux. Cette polyglotte (4 langues) construit la stratégie éditoriale d’un groupe présent dans 12 pays et 2 continents, crée et anime l’ensemble des outils et canaux de communication et veille à l’identité visuelle. Elle pilote également la communication de crise et le réseau d’une vingtaine de correspondant.es à l’étranger. Diplômée d’un master Business School de Lyon, Stéphanie a passé une partie de sa carrière dans le conseil : Havas Paris, en 2009, sur les problématiques de marque employeur, puis le cabinet de conseil en management Bain&Company en qualité de responsable de la communication et du marketing en 2013. Avant cela, son premier poste, c’était à Londres, chez TUI Group, numéro 1 mondial du secteur touristique où elle était responsable de la communication interne et externe.
Epresspack : La crise a mis l’utilité et la raison d’être au rang de priorités pour les entreprises. Quelle est la vôtre ? Et pourquoi son expression fait-elle sens aujourd’hui plus qu’hier ?
Stéphanie Herrmann : La crise a changé le consommateur qui ne veut plus de bullshit mais elle change aussi l’entreprise, qui ne peut plus vendre du superflu et doit revenir à l’essentiel. Repenser ses fondamentaux, être plus authentique et transparente, rester crédible… L’entreprise ne peut plus communiquer sans preuve quand la société dans son entier a besoin de sa contribution. « Reinvent being together » ou « réinventer le vivre ensemble » ; notre raison d’être était là bien avant cette crise, qui lui a donné une résonance particulière. Sécurité, hygiène, affichage, flux … tout devait continuer à fonctionner dans les meilleures conditions pour que les commerces essentiels restent ouverts. En plus de la continuité du service, il y a ce rôle de lien social qui n’arrête pas de m’étonner. On ne le sait pas assez mais nos centres commerciaux sont des lieux de rencontres, des lieux intégrés aux bassins de vie comme on dit aujourd’hui. En pleine crise, ils ont créé des services nouveaux et mis en place des initiatives pour garder le lien avec les consommateurs-citoyens et apporter leur contribution. Cours de cuisine en ligne en Autriche, concours de jardinage, performance musicale en plein Berlin pour les habitants confinés, click and collect commun dans les shopping centers aux Etats-Unis, appli de files d’attente…
Votre RSE date de 2007. Comment jugez-vous la communication des entreprises et son évolution sur ces sujets ?
La crise a révélé les priorités et mis en lumière les cultures d’entreprise. Certaines se sont focalisées sur l’interne comme Accor, d’autres sur la contribution sociétale et d’autres enfin, se sont positionnées sur le partage de la valeur. Chez nous, c’est le lien social qui s’est imposé… avec les antennes d’associations pour les victimes de violences conjugales, la livraison des repas aux enfants ou la mise à disposition des parkings pour les tests Covid et les personnels soignants ; des décisions qui ont été prises souvent au niveau local et parfois par les centres eux-mêmes.
L’explosion des achats en ligne et des expériences virtuelles va-t-elle modifier le modèle économique des foncières de commerce comme la vôtre ? Les commerces physiques ont-ils encore un avenir ?
Le e-commerce a beaucoup progressé pendant la crise, mais dès que les magasins ont rouvert, la clientèle est revenue. L’homme est un animal social, il ne faut pas l’oublier. Chez URW, nous sommes convaincus que la crise agit comme un accélérateur de transformation. Celle du commerce a commencé il y a longtemps, pour devenir omnicanal conjuguant le click and collect et l’expérience en magasins. Le Halo effect constate par exemple qu’à l’ouverture d’une boutique, les ventes en ligne de la marque augmentent dans la même zone de chalandise. Les marques ont aussi bien compris que le consommateur vient chercher une expérience qui n’existe pas online, de sorte que des marques historiquement digitales ouvrent des magasins physiques dans nos centres comme le pop-up store Snapchat, Amazon Books, le lunettier Warby Parker ou Kulie Cosmestics.
Le centre commercial est devenu un symbole de surconsommation. Comment comptez-vous vous adapter aux aspirations plus frugales ?
Les gens ne viennent pas forcément chez nous pour consommer, ils viennent aussi pour passer des moments ensemble. C’est un constat que l’on fait depuis longtemps et qui transforme nos sites. Nos centres commerciaux accueillent par exemple des espaces de coworking, des centres de fitness, des spas, des concerts, des crèches, de la gastronomie… Regardez le centre commercial de Montparnasse, Les Ateliers Gaîté, en cours de rénovation, il accueillera une bibliothèque, une crèche et le plus grand food hall d’Europe, un espace de 4000 m2 à la découverte de 30 chefs cuisiniers français. 70 % de l’espace seront consacrés au vivre ensemble et à tout autre chose qu’au shopping tel qu’on l’entend.
Fréquentation en baisse, fermetures de boutiques, loyers impayés ou renégociés, immobilier de bureaux questionnés, réduction des dépenses… Unibail vit probablement la pire crise de son histoire. Que peut la communication dans ce contexte ?
Je dirais que la communication accompagne la transition. La communication interne est devenue plus intense et transparente, moins formelle et plus directe. La communication avec les marques, elles-mêmes en transformation, a pris plus de place et d’importance. Exit l’uniformisation, on s’adapte à l’artisan local et à la marque internationale que ce soit pour l’aider à repenser le point de vente, les offres ou la communication post-crise. La communication externe, elle, vise à rassurer les clients. Certes, tout le monde n’est pas revenu en magasins, notre trafic est de 80 % par rapport à ce que nous constations l’an dernier à la même époque, mais le panier moyen est, lui, supérieur en France notamment.
En quoi la crise transforme-t-elle votre stratégie et vous actions de communication ?
La communication a nécessité plus de rapidité, de réactivité et une connexion plus grande avec le terrain. On a mis de côté les chantiers au long cours comme l’architecture de marque et changé le cap du site web, qui de grand public devient BtoB au service du business. Des budgets ont été mis en sommeil en attendant d’y voir plus clair, comme les conventions ou les salons professionnels. Cette crise, c’est une gueule de bois pour tout le monde. Les communicants ont tous été pris de court et fait du mieux qu’ils pouvaient pour s’en sortir. Je ne pense pas qu’on soit d’ailleurs revenus à la normalité, car le post-crise, c’est encore la crise. Maintenant, personne ne sait de quoi sera fait demain et c’est là que la raison d’être de l’entreprise prend tout son sens. C’est le seul repère qu’il nous reste dans un monde où on vit au jour le jour.
Votre 1er centre commercial a fêté ses 50 ans l’an dernier. La publicité TV, l’affichage, les prospectus n’appartiennent-ils pas à un autre temps ?
Eh bien non ! Parce que l‘ancrage local de nos centres commerciaux nous oblige à être présents dans le paysage urbain, nous utilisons encore le métro, les sucettes, les 4×3, la presse gratuite, la presse locale, le tout agrémenté de publicité digitale. De ce point de vue, la promotion, qui doit aller à la rencontre des gens, n’a pas beaucoup changé.
Un nouveau siège pour l’été 2021 à la Défense. Ça tombe bien ou ça tombe mal ?
C’est un projet qui tombe à pic au moment où nous repensons nos modes de travail. On pourra appliquer notre raison d’être et adopter pour nous-mêmes, notre philosophie du « new art working » basée sur les rencontres fortuites entre les collaborateurs pour encourager la créativité. C’est un projet énorme et très stimulant pour la communication, qui a déjà commencé avec des enquêtes internes sur les attentes des collaborateurs. On va non seulement emménager dans une tour que nous avons dessinée et imaginée mais se rapprocher de nos autres actifs à la Défense, Les 4 Temps, le CNIT, les autres tours… C’est un projet engageant et positif qui va nous permettre de rayonner et de développer la fierté d’appartenance des collaborateurs qui y vivront et de tous les autres.
Pourquoi Unibail-Rodemco ?
Le rachat de Westfield donnait naissance à un nouveau groupe. On me proposait d’établir les repères d’une nouvelle marque corporate. Comment présenter le groupe, comment parler de nous, avec quel ton, quels outils, comment exprimer nos valeurs, poser les bases d’une stratégie RSE… C’était un électrochoc pour un groupe qui ne s’adressait qu’aux investisseurs. J’ai été séduite par cette page blanche car on a rarement l’occasion de commencer de zéro. Je n’ai pas été déçue, c’est une boîte exigeante, qui impose de la rigueur et de l’excellence mais donne en contrepartie, les moyens de faire et réaliser ses envies. Avec le temps, la com’ a mûri, elle est devenue BtoBtoC, mieux structurée, centralisée, harmonisée et plus importante aux yeux des dirigeants. La crise bat encore les cartes puisqu’il nous faut nous inscrire dans une nouvelle normalité. Sans compter qu’il me reste encore beaucoup de combats à mener, comme celui de la nécessité du changement de nom pour lequel je ne désespère pas de convaincre.
Vous êtes un produit de la méritocratie et de l’intégration. La France, vous la vivez comment ?
Je suis née en Equateur où j’ai vécu 18 ans. J’ai eu la chance de pouvoir faire mes études en France grâce à l’obtention d’une bourse d’excellence. J’ai choisi de faire une classe prépa, à Limoges parce que c’était central et que Paris, c’était trop grand. J’y ai été la première étrangère et loin d‘être une fracture pour moi, c’était un rêve qui se réalisait. Je suis francophile depuis toujours, pour la culture, le modèle social, la gastronomie… et puis Paris, quelle ville ! Alors oui, les Français sont des râleurs mais c’est aussi grâce à ce trait de caractère qu’ils ont fait de leur beau pays ce qu’il est. Ici, je vis un rêve tous les jours. Je sais mon enthousiasme peut faire sourire… mais je suis une optimiste née. En Amérique Latine, on pense toujours que demain sera meilleur qu’aujourd’hui.
Propos recueillis par Yaël Dorfner
À propos de Unibail-Rodamco-Westfield
Premier créateur et opérateur global de centres de shopping, le groupe Unibail-Rodamco-Westfield détient, développe et opère un portefeuille de retail dans les métropoles européennes et américaines, comprenant des centres de shopping parmi les plus grands au monde et les pôles de commerce situés dans les aéroports les plus fréquentés aux Etats-Unis (LA, Miami, NY, Chicago…). Les activités du Groupe, bailleur d’immobilier commercial, comprennent également des immeubles de bureaux prestigieux et des centres de congrès & expositions majeurs à Paris et dans sa région. Ses 90 centres de shopping présents sur 2 continents et dans 12 pays (France, UK, Espagne, Allemagne, Autriche, Pologne, Pays-bas, Suède, Slovaquie, République Tchèque, Autriche, USA) accueillent quelques 1,2 milliards de visiteurs par an. Le portefeuille du Groupe, coté au CAC40 en France, à l’AEX 25 aux Pays-Bas et ASX 100 en Australie, est valorisé à 65,3 Mds€ au 31 décembre 2019. Présidé depuis 2013 par Christophe Cuvillier (Linkedin, twitter), Président du directoire, le Groupe rassemble 3 600 collaborateurs.
Sponsorisé par Epresspack
À propos de Epresspack
Editeur européen de newsrooms digitales, la start-up Epresspack a pour ambition d’offrir le meilleur de la technologie et du design au service de la réputation des marques et des entreprises. Les plateformes de gestion de contenus @Epresspack sont des outils propriétaires et 100 % européens qui regroupent l’ensemble des fonctionnalités de communication au même endroit : créer, diffuser, certifier et archiver des contenus aux formats les plus innovants, pour aider les marques et entreprises à se penser comme un média. Quelques 300 grandes marques et entreprises internationales (40 % CAC 40) lui ont confié l’hébergement et la gestion de leurs contenus au service de leurs relations publics et de leur marketing d’influence. Parmi elles, le Groupe Accor, Abbvie, ADP, Audi, Dyson, Bouygues, BPI France, Dove, Hermès, Kering, ING direct, Manpower Group, Mediawan, SNCF, Taittinger, Vinci ou encore Vivatech. Fondé par Antoun Sfeir, CEO, cet acteur tech du secteur de la communication gère une audience cumulée de 3,5 M VU (2019) et rassemble 50 collaborateur.rices à Paris, Londres, Milan et Madrid.
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