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« La crise a donné un rôle plus important aux entreprises qu’aux marques »

PAROLE À

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08/10/2020

#DIRCOMM(DÉ)CONFINÉS #INTERVIEW13 – Domitille Fafin, directrice de la communication externe du groupe L’Oréal

La série #DIRCOMM(DE)CONFINES se poursuit. Parce que la crise sanitaire mobilise la fonction communication dans un contexte incertain, Epresspack sonde les professionnel.les de la communication et du marketing qu’elle accompagne quotidiennement en France et en Europe. Cette semaine, Domitille Fafin, directrice de la communication externe du groupe L’Oréal

Depuis le début de l’année, Domitille Fafin occupe le poste de directrice de la communication externe du groupe L’Oréal. Littéraire de formation, diplômée de Sciences Po – École d’affaires publiques et de l‘ESSEC, Domitille (36 ans) commence sa carrière dans le secteur de l’énergie, motivée par les problématiques d’aide au développement de l’Afrique sub-saharienne. En contrat d’alternance chez Shell, elle achète des polymères puis demande un job sur le terrain « pour apprendre la vie ». Elle se colle alors à l’approvisionnement et au trading de GPL jusqu’à ce que Shell France, empêtré dans une affaire politico-médiatique, l’embauche en urgence comme directrice de la com’ et des affaires publiques, sa vraie passion. Elle a alors à 27 ans. Cinq années du même régime et deux enfants plus tard, elle est chassée pour les cosmétiques. L’Oréal, c’était pourtant l’antithèse de ses aspirations, rebutée par les profils archétypaux des bancs de l’école de commerce… mais elle devine l’importance donnée à la science et aux matières premières et l’engagement de l’entreprise dans la transition écologique. Onze entretiens plus tard, elle dit oui et crée de toutes pièces le poste de directrice de la communication et des affaires publiques de L’Oréal France. Deux ans plus tard, cette spécialiste de la com’ prend du galon et pilote, au nom du groupe, une équipe de 10 personnes et 3 pôles d’expertises : les relations médias, le social media et la communication de crise. Domitille, qui s’intéresse aux sujets de mixité, de diversité et d’indépendance des administrateur.rices, est par ailleurs membre du conseil consultatif de Orange Business Services

Epresspack : Vous dites que la crise donne plus d’importance encore à la communication corporate. Vous pourriez nous expliquer ? 

Domitille Fafin : Je trouve en effet que la crise a donné un rôle plus important aux entreprises. Ce sont les groupes qui se sont exprimés pour aider les premières lignes, bien davantage que les marques. On a tous ressenti cette forte attente de la part des citoyens envers les entreprises et leurs dirigeants quant à la façon dont ils allaient contribuer à l’effort collectif. Aujourd’hui, même si on n’est plus dans le cœur de la crise, la période complexe et incertaine fait que c’est encore le cas. Chez L’Oréal, nous avons pris par exemple l’engagement de maintenir le recrutement des stagiaires et des apprentis au même niveau ; une décision que l’on a prise au niveau du groupe, à l’échelon « corporate » et qui essaime dans toute l’organisation.

La distinction entre communication corporate et communication commerciale a-t-elle encore un sens quand les questions de société comme le climat, la diversité ou le bien-être animal influent de plus en plus sur le commerce ? 

Je pense que les deux coexisteront toujours. Pour un groupe comme le nôtre, Il y aura toujours la marque corporate et les marques commerciales. Mais il est vrai qu’on assiste à une vraie porosité entre elles et c’est tant mieux ! Car pour être fort et impactant, le discours corporate doit se nourrir de preuves et ce sont les marques qui les mettent en œuvre. A l’inverse, les marques tendent de plus en plus à développer un vrai discours corporate avec, en miroir, une vraie envie de montrer leurs engagements. 

Selon vous, les organisations d’entreprises doivent elles évoluer en conséquence ?  

Aujourd’hui tout le monde dans l’entreprise doit, à mon sens, se sentir responsable de la réputation du groupe et a un rôle à jouer pour y contribuer positivement. Cela fait 15 ans que je travaille, les matrices évoluent avec le temps et je doute qu’il existe une matrice idéale. L’important, c’est que les choix stratégiques soient diffusés dans toute l’organisation et que tout le monde soit embarqué dans le projet d’entreprise. 

Le groupe, qui a 110 ans, s’est longtemps caché derrière ses marques commerciales. On dirait que ça change. Pourquoi et pour quoi faire ?

Je ne suis pas en poste depuis 110 ans… mais ce qui est sûr, c’est que les consommateurs d’aujourd’hui attendent de la part des entreprises des valeurs autant que des produits, du sens autant que de services. Et la crise n’a fait qu’accélérer le phénomène. Chez nous, c’est bien ce socle de valeurs qui unit l’ensemble de nos 36 marques internationales. Jean-Paul Agon dit souvent que la performance non-économique va de pair avec la performance économique, qui se nourrissent dans un cercle vertueux. Partant de cette vision, L’Oréal s’est par exemple engagé fortement et très tôt en faveur du développement durable avec un programme à horizon 2030, qui concerne notamment l’eau, les émissions carbone et la déforestation. On est d’ailleurs la seule entreprise au monde qui a obtenu en la matière quatre ans de suite un triple AAA au classement international de référence, le CDP. Parmi les autres sujets qui nous tiennent à cœur et sur lesquels nous agissons, il y a la diversité, l’inclusion et notamment l’égalité hommes-femmes qui est un sujet très prégnant chez nous, tout comme les questions d’éthique.  

L’Oréal fut l’un des premiers groupes à se montrer solidaires pendant la crise. Quels en furent les réels bénéfices pour la marque groupe ?

Nous nous sommes effectivement lancés dans un grand plan de solidarité pour soutenir notre écosystème, en modifiant par exemple nos chaînes de production pour produire du gel hydro-alcoolique pour les personnels hospitaliers et la grande distribution, mais aussi en accompagnant financièrement nos clients et partenaires les plus fragiles. En termes d’engagement, ça a eu un impact incroyable ! D’abord, cela a créé un immense sentiment de fierté chez nos collaborateurs, qui constituent selon moi – même sans être en charge de la communication interne – la 1re audience de l’entreprise et la plus exigeante. Les bénéfices ont été également tangibles dans les entretiens d’embauche. Les candidats en parlaient spontanément ayant manifestement perçu et apprécié cette facette du groupe qu’ils ignoraient. De la même manière, j’entends de toute part que cela a incroyablement renforcé les liens avec nos clients et nos partenaires – les coiffeurs par exemple – et créé une fidélité très profonde. Quand j’entends les collaborateurs, les RH et les entités business nous faire de tels retours, je n’ai pas besoin de post-tests pour être convaincue que les bénéfices sur la marque groupe ont été grands. 

 La crise a-t-elle modifié votre stratégie de communication corporate et comment ? 

On s’est plutôt adapté aux circonstances exceptionnelles. L’impact et l’audience des réseaux sociaux nous ont incités à utiliser davantage les vitrines corporate du groupe pour parler à un public plus diversifié qu’avant. Mais la crise a également confirmé l’importance de la presse traditionnelle de qualité avec ses informations fiables et vérifiées. 

Y-a-t-il des règles à adopter pour gérer le boycott ou est-ce chaque fois une page blanche ?

Je viens du monde du pétrole où la com’ de crise est fréquente et parfois plus sensible encore. Ce que je sais, c’est qu’il n’y a jamais de réponse préfabriquée. D’abord parce que les circonstances sont chaque fois différentes et aussi parce que la société évolue sans cesse. De fait, la réponse d’il y a 5 ans n’est plus la bonne. La seule chose qui ne change pas, c’est la nécessité d’anticiper et de se former. Faire des simulations, s’entraîner… ça fait gagner un temps précieux pour faire face à des crises qui arrivent par définition toujours le soir, les week-ends ou pendant les vacances !

Dans 5 ans, vous aimeriez qu’on parle de la marque groupe L’Oréal comment ? 

Traditionnellement, le groupe est connu pour ses performances, son excellence en tant qu’école de formation Marketing ou sa grande stabilité. J’ai découvert pour ma part des convictions fortes, par exemple sur le DD (développement durable), l’égalité hommes-femme ou encore le bien-être de ses collaborateurs. Le congé paternité a d’ailleurs été chez nous allongé bien avant la loi ! Quand on soulève le capot, le groupe recèle d’actions incroyables. Mon objectif, c’est que L’Oréal soit autant reconnu pour ses soft skills que pour ses hard skills.

Selon vous, l’innovation est-elle encore synonyme de progrès ?  

Pour moi c’est une évidence et j’ai plutôt tendance à me méfier des gens qui se méfient de l’innovation. L’innovation peut être technologique mais aussi sociétale, environnementale … Elle est multi-facettes. Je parlais récemment à des chercheurs à qui on a demandé de développer un produit sur la base de 3 ingrédients seulement. Ils étaient ravis car cette nouvelle contrainte leur permettait, selon eux, d’innover dans un sens intéressant. L’innovation est un impératif et c’est la responsabilité de l’entreprise de faire en sorte qu’elle nous fasse progresser. C’est pour cela que chaque nouveau produit doit avoir chez nous un bilan environnemental et social meilleur que le précédent.

Propos recueillis par Yaël Dorfner

À propos de l’Oréal

Leader mondial de la beauté, présent dans 150 pays sur les cinq continents, le groupe L’Oréal rassemble 36 marques internationales et emploie 88 000 employé.es dans le monde. Depuis plus d’un siècle, ce fleuron français ne se consacre qu’à un seul métier, la beauté, avec pour mission de fournir le meilleur de l’innovation cosmétique aux femmes et aux hommes du monde entier (4100 chercheurs, 498 brevets déposés, 3,5 % du chiffre d’affaires). Son ambition est de conquérir 1 milliard de consommateur.rices supplémentaires en créant des produits cosmétiques qui répondent à l’infinie diversité des besoins et des désirs. La flottille des marques est organisée en divisions, présentes dans tous les circuits de distribution : le marché de la grande consommation, les grands magasins, les pharmacies et parapharmacies, les salons de coiffure, le travel retail, les boutiques de marque et le e-commerce. Le groupe s’est par ailleurs engagé dans une politique de développement durable ambitieuse, en y associant l’ensemble de son écosystème, pour œuvrer à une société plus inclusive et durable à l’horizon 2030. Après un exercice 2019 record, le groupe – dont la France est la 3e filiale – résiste au premier semestre 2020.

Sponsorisé par Epresspack

À propos de Epresspack 

Editeur européen de newsrooms digitales, la start-up Epresspack a pour ambition d’offrir le meilleur de la technologie et du design au service de la réputation des marques et des entreprises. Les plateformes de gestion de contenus @Epresspack sont des outils propriétaires et 100 % européens qui regroupent l’ensemble des fonctionnalités de communication au même endroit : créer, diffuser, certifier et archiver des contenus aux formats les plus innovants, pour aider les marques et entreprises à se penser comme un média. Quelque 300 grandes marques et entreprises internationales (40 % CAC 40) lui ont confié l’hébergement et la gestion de leurs contenus au service de leurs relations publics et de leur marketing d’influence. Parmi elles, le Groupe Accor, Abbvie, ADP, Audi, Dyson, Bouygues, BPI France, Dove, Hermès, Kering, ING direct, Manpower Group, Mediawan, SNCF, Taittinger, Vinci ou encore Vivatech. Fondé par Antoun Sfeir, CEO, cet acteur tech du secteur de la communication gère une audience cumulée de 3,5 M VU (2019) et rassemble 50 collaborateur.rices à Paris, Londres, Milan et Madrid.


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