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Et si la communication non-profit pouvait être une source d’inspiration pour les entreprises ?

FUTUR

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19/12/2019

Secteur public et économie sociale et solidaire ont un point commun, celui de mettre en œuvre des stratégies de communication dites « non-profit », soit n ayant aucun objectif commercial. Et justement, cette communication et la culture de ces 2 secteurs peuvent être une source d inspiration formidable pour les entreprises !

Il est étonnant de constater que le Secteur public et l Economie sociale et solidaire regardent depuis plusieurs années avec attention le secteur privé et s inspirent, avec raison, de ses méthodes pour chercher une meilleure performance. Ils recrutent d ailleurs à tour de bras pour internaliser de nouvelles expertises et innover dans leur organisation, leur management, leur stratégie, leurs actions. En parallèle, le secteur privé, notamment dans ses enjeux de communication, ne semble pas s intéresser outre mesure à ces secteurs et regarder s ils pourraient lui être utiles, dans une logique au minimum de benchmarking.

Pourtant, outre les méthodologies de travail et de relations aux parties prenantes qui ont fait leurs preuves dans le « non-profit », je vois 6 autres sujets d inspiration possible.

La démarche participative

Comment communiquer au plus juste sans travestir la pensée de ses interlocuteurs ? Travailler au service de personnes en difficulté ou malades oblige le communicant à s interroger sur la bonne manière de parler de son sujet. A la fois pour respecter la parole et la situation de celles et ceux que l on appelle les « bénéficiaires ». Mais aussi pour créer une communication la plus juste possible qui touchera sa cible (par exemple des donateur.rices) et la fera réagir. Or, le secteur, très influencé par la pratique innovante de la Fondation de France à ce sujet, érige la notion de démarche participative, ou de co-construction comme la condition sine qua non de l efficacité de ses actions. Dans cet environnement, le.la communicant.e ne peut plus se comporter comme un sachant, accompagné.e de ses seules agences mais expérimente l intérêt de travailler avec les bénéficiaires, pour élaborer avec eux.elles sa propre communication.

La déontologie et la réputation

Comment respecter le libre arbitre de celui à qui je m adresse, comment informer et communiquer par exemple lorsque la personne concernée est âgée ou en situation de faiblesse ? Ces questions sont au cœur de la pratique des communicant.es non-profit, qui utilisent tous les outils classiques du marketing opérationnel et leur vocabulaire militaire (stratégie, attaque, cible, etc.) et doivent savoir poser des limites, pour rester en cohérence avec les missions sociales et l éthique de son organisation. Il est intéressant par exemple de connaître la position des Petits Frères des Pauvres, association luttant contre l isolement des personnes âgées grâce aux dons et aux legs, et qui a décidé par déontologie de ne jamais accepter de biens provenant de personnes qu ils ont accompagnés. Cette question de l éthique se pose en particulier sur des outils s appuyant sur la data et l intelligence artificielle (marketing direct, réseaux sociaux), afin de bien s assurer que les méthodes utilisées ne pourront jamais être reprochées à l organisation, accusée alors de manipulation de ses client.es

Le changement comportemental

Comment modifier structurellement le comportement des consommateur.rices, au-delà de l impulsion d un geste d achat ? La communication d intérêt général est confrontée à cet enjeu de profondeur de son travail, inhérente aux missions des organisations sans but lucratif, qui veulent changer les choses, voire le monde Cette ambition oblige à s interroger, analyser, étudier, détecter et tester les leviers de ce changement, avec les experts concernés (chercheurs, sociologues, psychologues). Elle pousse également la gouvernance à accepter une vision longue de la stratégie de communication, à définir un plan continu et global sur plusieurs années pour transformer véritablement la perception et le comportement de ses cibles. Ainsi, c est cet investissement assumé et respecté dans le temps qui a permis à l éco-organisme Ecofolio (aujourd hui Citeo) de transformer durablement le regard porté sur le recyclage des papiers et le geste de tri des habitants sur tous les territoires.

L évaluation et le feed-back

Comment évaluer en toute objectivité l impact réel de ses actions et à quoi cela sert-il vraiment ? La question de l impact social des organisations sans but lucratif est au cœur des préoccupations du secteur depuis longtemps. C est l arrivée de la nouvelle philanthropie, soit l envie de chef.fes d entreprise fortuné.es du secteur privé, de participer à l intérêt général en donnant de l argent à des associations ou des fondations tout en les interrogeant sur leur ROI (retour sur investissement), qui a accéléré le mouvement ces 15 dernières années. C est un sujet complexe car il faut être capable d isoler l action de l organisation sur une problématique ou un groupe de personnes, dans un contexte pluri-factoriel où beaucoup d acteurs entrent en jeu. Il y a 25 ans, les associations de solidarité internationale, confrontées à cette demande émanant de leurs financeurs publics, se sont réunies au sein du réseau F3E pour imaginer les outils d évaluation des actions de solidarité et partager les bonnes pratiques. Aujourd hui, les outils développés permettent de faire de l évaluation et de l étude d impact social une méthode de transformation et d amélioration de l organisation elle-même.

La valorisation du qualitatif

L évaluation quantitative des actions de communication est-elle suffisante ? Cette exigence de résultat et de performance, demandée à l économie sociale et solidaire, a introduit dans ce secteur des outils et méthodes issues du secteur privé, cherchant avant tout à quantifier les impacts, comme l illustre le travail sur la mesure d impact social en France, édité par le cabinet KPMG. Cette vision purement quantitative s applique à la communication dans le travail d évaluation des baromètres ou études quantitatives réalisées par les instituts de sondage traditionnels. Mais le secteur de l intérêt général baigne dans une culture forte du qualitatif, qui résiste à cette tentation du tout chiffré Cette résistance est bien utile, car les chiffres ne disent pas tout de la réalité d une situation. Ne confondons pas la carte et le territoire, pour citer Michel Houellebecq. 

La communication de filière

Et si l on était plus puissant à plusieurs ? Les entreprises connaissent bien ces principes d une communication commune, mise en œuvre par leur syndicat professionnel pour défendre un intérêt partagé. C est le cas de la campagne du Leem (les entreprises du médicament) qui valorise l utilité d un secteur économique très souvent critiqué. Les acteurs de l intérêt général sont souvent confronté.es à l'impossibilité de débloquer des budgets conséquents pour une campagne ad hoc, ils ont donc trouvé une autre méthode bien utile : réunir tous les acteurs concernés (entreprises, associations, services publics, ), les fameuses « parties prenantes » et construire ensemble des messages communs de communication, qui seront ensuite portés par chacun dans sa communication propre. Il peut s agir de choix de wordings particuliers, de thèmes privilégiés de communication choisis chaque année, qui sont ainsi disséminés dans toutes les communications des acteurs du sujet, permettant de prendre en étau le citoyen et la citoyenne pour changer leur imaginaire.

Cette époque voit la frontière traditionnellement hermétique entre les 3 secteurs de l économie - privé, public, économie sociale et solidaire - s effriter, comme le montrent de nombreuses start-up qui peuvent prétendre à l économie sociale et solidaire, comme toute association ou fondation car elles inventent des produits ayant un impact social réel. Et le nouveau concept d Entreprise à mission n est pas là pour arranger les choses et c est tant mieux !

Alors oui, entreprises, regardez ce que produit le secteur non-profit et la manière dont il travaille, cela peut être une source d inspiration pour vous aider à être plus performantes !

Fabrice Van Kote, Directeur des opérations et de la communication, Ateliers d'Art de France


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