Les meilleurs conseils de Typhaine D pour gérer les situations sexistes, au travail et dans la vie
Typhaine D, une coach pas comme les autres (son interview est ici), est venue chez COM-ENT en septembre, à l invitation du réseau TFTC Trente-cinq femmes étaient là pour dialoguer avec elle, la questionner et bénéficier de son expérience. L objectif : aider chacune à prendre mieux sa place dans le monde du travail. Pour toutes celles qui n ont pas pu assister à ce grand moment de partage, à la fois éclairant, joyeux et regorgeant d énergie (tout en sororité !), on récapitule les meilleurs conseils de Typhaine D pour déjouer les pièges sexistes et s affirmer professionnellement en tant que femme dans la communication.
Alerte au sabordage !
Vous savez, cette soi-disant blague qui laisse supposer que vous n allez pas être à la hauteur de la situation ou de la mission parce que vous êtes une femme
C est dit, c est intégré !
Insidieusement, cette parole vous sexualise en vous assignant une place inférieure. Elle vous humilie et sape la confiance que vous avez en vous et peut vous conduire à vous saborder sur l air de « Je n ai pas le droit de réussir, donc je fais en sorte de ne pas réussir ».
La sidération : même pas grave
Il vient de vous balancer une remarque incroyablement sexiste, et vous restez là, interloquée, incapable de répondre. Et puis les mots vous viennent, mais il est trop tard, et évidemment, vous vous en voulez.
Vous êtes tout simplement en état de sidération. Ce mécanisme bien connu, qui a été étudié scientifiquement, provoque un blocage de la pensée et vous empêche de mobiliser le meilleur de vos capacités intellectuelles pour répondre.
C est NORMAL ! Et c est fait pour ça Arrêter de culpabiliser après est déjà une manière active de réagir.
Ne pas réagir est un mécanisme de combat
Au bureau, dans la rue, un propos déplacé, voire franchement salace. Pas facile de réagir, il faut encore trouver la force d affronter cette situation conflictuelle. Mais en fait, rien ne vous oblige à éduquer l agresseur, épargnez-vous une charge de plus !
Ayons le sens de l esquive on le loue bien dans les sports de combat ou en stratégie militaire c est une gentillesse que nous nous devons à nous-mêmes. Ignorer superbement une agression verbale sexiste déstabilise son émetteur et le prive de l effet escompté.
Pensez d abord à votre intérêt : si cela ne va pas dans le sens de votre stratégie, si la situation est compliquée ou dangereuse, passez à autre chose. Et souvenez-vous : ne pas répondre, c est DIGNE, c est un vrai mécanisme de combat.
Cas particulier : si le propos vient d une personne de votre équipe, vous êtes dans votre rôle de manager et devez cadrer et expliquer les règles de vie dans l entreprise, mais plutôt en collectif.
La prise de parole, ça se conforte entre femmes
Dans les réunions du matin à la Maison Blanche, sous Obama comme sous Bush (et on imagine sous Trump), les conseillères du président ont du mal à se faire entendre : manque d attention de l auditoire, difficulté à prendre la parole, qui est coupée comme dans la majorité des réunions « pro » où les hommes sont majoritaires. Ça vous rappelle quelque chose ?
Elles ont donc mis au point une stratégie collective, appelée depuis « technique de la Maison Blanche ».
1. Équilibrer la charge conversationnelle en faveur des femmes : lorsque l une d elles parle, toutes les autres (et les hommes alliés, bien sûr !) sont focalisées sur elle, acquiescent, soulignent l intérêt du propos.
2. Si un homme coupe la parole à une femme (92 % des interruptions de la parole dans des échanges mixtes sont causées par des hommes contre des femmes), les autres femmes ne le regardent même pas et encouragent l oratrice à continuer. Ou les femmes le font taire et l obligent à écouter.
3. Lorsqu une femme avance une idée, celle qui intervient ensuite souligne son intérêt, valorise l émettrice, répète son nom à chaque fois qu elle parle de l idée. Ainsi, la maternité de l idée est visible, ce qui évite la récupération sauvage.
Cette stratégie collective est facile à mettre en place : au début, brief en groupe avant la réunion, ensuite ça devient un réflexe.
Autorisez-vous à jouer un rôle
Aujourd hui, côté forme, vous n êtes pas au top, loin de là ! Pourtant, cette présentation est hyper importante. Pourtant, vous n avez pas que des allié.es, à commencer par votre boss. Et l auditoire est 100 % masculin, profil managers de plus de 50 ans adeptes de l entre-soi.
Vous êtes en représentation, ce qui vous autorise à jouer un rôle : nul.le n a besoin de connaître vos points faibles, ceux où ça fait vite mal, c est de l ordre du privé.
Alors vous endossez votre costume spécial « tu ne m atteindras pas », vous envoyez des signaux qui disent que vous êtes forte, vous aimez être là, vous avez l habitude de ce genre de situation.
Pour cela, vous allez utiliser le langage corporel, il vous renforce et vous donne confiance : posture, appuis, gestuelle, débit, intonation, etc. Evidemment, ça se travaille Une priorité toute simple : assurez votre STABILITÉ. Votre corps est centré, vos jambes sont droites jamais croisées !! ancrées dans le sol, vous avez de la prestance, quand vous bougez c est avec lenteur et assurance. L équilibre instable fait partie de la représentation féminine type, mais il ne passera pas par vous !
Victimes et oppresseurs : le poids et la juste place des mots
Vous avez remarqué ? Quand on parle des femmes, le mot de victime devient honteux, comme par magie (idem pour les enfants) ! Et cela les conduit à nier le fait d être victime, ou à le minimiser
Il ne viendrait à l idée de personne de minimiser le statut des victimes d attentats ou d accidents de la route ! Il est temps de réhabiliter ce mot, banalisé, devenu péjoratif et curieusement dévalorisé quand il s applique aux femmes.
Être victime, ce n est pas un statut, ça ne vous définit pas ; c est un fait situé dans le temps et l espace, avec un agresseur ou un oppresseur qui le provoque (lui, pas vous !). Il faut résister à l inversion de la culpabilité, mécanisme redoutable qui consiste à mettre la honte, la médiocrité, la faiblesse sur le dos de la victime.
Au contraire, une victime qui se bat pour que justice lui soit rendue, c est une héroïne, ne l oubliez pas !
Comment réagir au sexisme féminin ?
Votre sensibilité féministe lui donne de l urticaire, elle refuse de féminiser son titre et se comporte « comme un homme », on dirait même qu elle en est fière Que dire à une femme qui a un comportement sexiste envers les femmes ?
C est normal, au sens de la norme, du système patriarcal dominant. Cela veut dire que cette femme est colonisée par ce système, au point d en adopter les codes sexistes (on exclut du champ le fait qu elle peut être violente, manipulatrice, etc., ce sont des données particulières). Elle subit elle-même le sexisme mais elle l a intégré, et refuse de voir l ampleur de la catastrophe pour survivre.
Leur en vouloir plus qu aux hommes ne sert à rien. Si vous en avez l opportunité, essayez de la faire réfléchir, à partir d une situation sexiste externe à son action, sur « qui en tire bénéfice » Et d avancer avec elle sur le chemin de la SORORITÉ.
Vous devez accepter de ne pas tout dire, tout de suite, à une femme qui bloque : toute vérité féministe n est pas bonne à dire à toutes les étapes de la vie. Le seul fait d exister comme vous êtes et d avoir lancé une idée antisexiste, c est une graine que vous avez semé vous verrez bien ce qu elle en fera.
Sûr, vous êtes légitime !
Dans l entreprise, en agence, on passe beaucoup de temps à se demander si on est légitime, en temps que femme, et encore plus en tant que jeune femme. C est un frein énorme qui pollue le quotidien.
L illégitimité est un vrai syndrome que pratiquement toutes les femmes combattent. Les petites voix qui vous soufflent ce poison mentent, elles sont sociétales, elles ne vous appartiennent pas, ce n est pas VOUS. Faites-les taire et passez à l action, puis vous ferez vos propres réglages si nécessaire.
Dites-vous que vous n êtes pas moins légitime qu une autre ou un autre. C est la société partriarcale qui vous intime l ordre de rester à la place qu elle a définie pour vous. Décider que vous êtes légitime, c est à la fois un acte de résistance et de justice. Et ce faisant, vous faites avancer la cause de toutes les femmes autour de vous : non seulement vous êtes légitime, mais vous pouvez être fière de vous.
Harcèlement versus séduction
Une remarque que vous avez toutes entendues autour de la machine à café « À force de parler de harcèlement sexuel au travail, on risque de tuer la séduction. » On hoche la tête, on lève les yeux aux ciel, mais personne ne sait argumenter !
Le harcèlement sexuel, comme l agression sexuelle et le viol, ce n est pas de la sexualité, c est de la violence. L intention et les effets du harcèlement sont radicalement opposés à la séduction, qui relève de la sexualité partagée, agréable, heureuse. D une côté, le harceleur installe une relation déshumanisée. De l autre, la sincérité et l attirance mutuelle engagent naturellement la relation.
Et pour terminer, une définition pour les dîners en ville
Le féminisme, c est vouloir la fin de toutes les violences et de toutes les discriminations, quelles qu elles soient. Quand une personne vous dit « Je ne suis pas féministe », ça veut dire qu elle est pour garder les violences et les discriminations.
Sylvie Gousset, membre du réseau TFTC, Directrice associée INSIGLO
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