« Test d 'humanité », « en guerre » : malgré l'apparente diversité des imaginaires convoqués, les formules utilisées pour évoquer la crise actuelle semblent toutes renvoyer vers un même idéal : celui de l'exemplarité morale des citoyens, unis et solidaires dans l'adversité. Bien que portées par des sensibilités différentes, ces formules résonnent à l'unisson et nous rappellent que nous avons tous un rôle à jouer, une part de responsabilité dans le succès (ou l'échec) des mesures mises en œuvre pour lutter contre la pandémie.
En quelques semaines, près de 4 milliards de personnes ont été amenées à rester chez elles pour limiter la propagation du virus. Pour la plupart d'entre nous, faire société ne revenait plus à aller à la rencontre de l'autre mais au contraire à s'en isoler. C'est ainsi qu'en nous extrayant du monde, nous devenions réellement utiles aux autres. C'est ainsi que par obligation, par crainte ou tout simplement par civisme, nous sommes une grande majorité à respecter le confinement, qu'il soit partiel ou total. Comme en France (mais également dans bien d'autres pays) où nous acceptons, nous faisons le choix délibéré de renoncer à l'un de nos droits les plus fondamentaux celui de circuler librement au nom d'un intérêt général qui nous dépasse. Quelles que soient nos raisons, nous renonçons temporairement à l'une de nos libertés pour que d'autres puissent soigner et être soignés ; pour que d'autres puissent bénéficier de l'essentiel, pour que d'autres puissent accomplir l'essentiel. En acceptant de nous confiner, en faisant ce que certains appelleraient notre devoir de citoyen, nous gagnons certes en maturité collective et en responsabilité, mais peut-être aussi en fraternité.
Car en se propageant avec une telle virulence, la pandémie nous a également montré que la moindre de nos actions pouvait avoir des conséquences dramatiques. Elle nous a rappelé une évidence parfois oubliée : nous sommes tous responsables du bien-être des autres. Cette tâche n'incombe pas uniquement aux soignants ou aux travailleurs mobilisés pour nos besoins essentiels. Elle n'est pas uniquement de leur responsabilité et ne s'arrête pas avec eux. Au contraire, elle commence avec nous. Ce dévouement que nous applaudissons chez les autres ne doit pas nous faire oublier notre propre capacité à nous engager, notre propre responsabilité à leur égard. Se mettre à leur service, c'est par exemple respecter les mesures barrières et porter un masque dans les transports publics. Se mettre à leur service, c'est par exemple continuer à télétravailler quand cela est possible pour ne pas saturer les moyens de transport collectif. Se mettre à leur service, c'est simplement chercher à être à la hauteur de la situation, dans la limite de nos moyens.
En conclusion et pour paraphraser, il me semble que la situation actuelle nous incite à moins nous interroger sur ce que les autres peuvent pour nous, mais plutôt à avoir suffisamment d'orgueil et paradoxalement d'humilité pour nous demander ce qui nous pourrions faire pour eux.
© Arnaud Vareille
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